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Si l’administration des douanes se structure véritablement à partir de l’Ancien Régime, la pratique d’un prélèvement de taxes sur les mouvements de marchandises apparaît dès la plus haute Antiquité.
Chez les Grecs, des préposés aux recouvrements des impôts sont chargés de déballer les produits des cargaisons, de les compter, les peser et les évaluer.
Chez les Romains, la perception de taxes sur l’importation de produits par voies terrestres ou maritimes est déléguée par contrat à des publicains, tel Saint-Matthieu, devenu patron des douaniers. Ces financiers paient le droit de collecter les taxes et impôts au nom de la République, puis de l’Empire : c’est le principe de l’affermage.
Après la chute de l’Empire romain, les taxes perçues aux frontières sont peu à peu remplacées par de nombreux droits de péage locaux. Charlemagne, couronné empereur en l’an 800, s’efforce de clarifier ces droits de péages, les tonlieux.
Mais avec l’éclatement de l’Empire carolingien, les taxes retombent hors du domaine royal, elles se multiplient et se superposent, à des fins purement fiscales, au bénéfice des puissances féodales locales.
Au début du 14e siècle, l’intérêt économique des droits de douane commence cependant à être perçu : Philippe le Bel, puis Charles IV instaurent un début de politique douanière en taxant l’exportation des vins, grains, viandes et poissons.
Aux 15e et 16e siècles, les besoins du Trésor continuent de faire proliférer les droits d’entrée et de sortie. Le système de l’affermage se généralise. Il repose sur un bail signé entre le roi et un adjudicateur pour une durée limitée. Chaque taxe fait l’objet d’un bail par province.
Pour clarifier cet enchevêtrement fiscal, le duc de Sully, surintendant des finances d’Henri IV, propose en 1598 de réunir les principales taxes, appelées les « cinq grosses Fermes », sous un bail unique accordé à un fermier unique. Grâce à lui, les provinces « des cinq grosses Fermes » partagent le même système fiscal et peuvent commercer librement entre elles. Les provinces dissidentes qui refusent de les rallier sont dès lors « réputées étrangères ».
Le 17e siècle marque le début d’un essor commercial sans précédent pour la France. La Marine royale devient l’instrument de l’expansion française. En se reposant sur les importations de produits coloniaux, la France multiplie par dix le volume de son commerce extérieur en cent ans.
En 1661, l’arrivée aux Finances de Jean‑Baptiste Colbert a un impact décisif sur le développement du commerce français. Il ne se contente plus de prélever des taxes sur les marchandises mais prend également des mesures incitatives pour soutenir le commerce et protéger les manufactures nationales. Le rôle économique des droits de douane est affirmé avec le tarif douanier de 1664 : pour la première fois, la France dispose à ses frontières d’un début de tarif national.
Au 17e siècle, presque tous les droits de douane et autres impôts indirects sont affermés. Désireux de resserrer le contrôle de l’État, Colbert regroupe en 1669 plusieurs fermes en un bail unique, passé avec une compagnie de financiers connue sous l’appellation de « Ferme générale du Roi ». Les dirigeants et actionnaires de cette compagnie, chargée du recouvrement des taxes, sont appelés Fermiers généraux.
La Ferme compte jusqu’à 42 directions en province et près de 25 000 agents. Les employés de la Ferme ne sont pas des fonctionnaires royaux, mais ils agissent « au nom du Roi ». Ils bénéficient à ce titre de privilèges et de la protection de la loi.
A la fin du règne de Louis XVI, la France se trouve confrontée à une crise financière dramatique. Les Français s’expriment à travers des « cahiers de doléances » dans lesquels sont dénoncés le poids de plus en plus lourd des impôts et les inégalités sociales. Le 12 juillet 1789, les Parisiens se soulèvent et s’attaquent à un symbole du pouvoir royal : les barrières de l’octroi de Paris, appelées « mur des Fermiers généraux ». Ces scènes d’émeute marquent le début de la Révolution française.
La Ferme générale est alors l’une des institutions de l’Ancien Régime les plus vivement critiquées. L’Assemblée la supprime et la remplace, le 1er mai 1791, par la Régie nationale des douanes. Pour la première fois, un Tarif national unique est adopté et les droits de traite intérieurs sont abolis.
Pour constituer un système douanier cohérent et plus efficace, le Consulat crée en 1801 la Direction Générale des Douanes. Les douaniers sont dotés de leur premier uniforme, qui se compose d’un habit et culotte de drap vert, d’un gilet et d’un bicorne.
A partir de 1805, Napoléon part à la conquête d’un grand empire, qui atteindra son apogée en 1812 avec 130 départements, aux limites duquel veillent 35 000 douaniers. Les guerres napoléoniennes changent radicalement l’orientation de la politique douanière. Pour préserver l’approvisionnement du pays et affaiblir l’ennemi anglais, Napoléon instaure un blocus continental de 1806 à 1814.
À partir de 1815, l’installation durable du protectionnisme assure à la douane une place de premier plan. La surveillance douanière se renforce sur tout le territoire. Les principaux points de passage aux frontières sont dotés de bureaux de douane et des brigades sont échelonnées sur les limites territoriales. Une deuxième ligne est placée à environ 20 km à l’intérieur des terres. La zone intermédiaire est appelée « rayon douanier ». Elle est divisée en 25 directions.
En 1860 le retour du libre-échange assouplit la réglementation douanière, ce qui stimule les échanges internationaux, que le chemin de fer et la navigation à vapeur accélèrent. Les frontières françaises se déplacent à deux reprises : en 1860, lors de l’annexion de Nice et de la Savoie, puis en 1871, avec la perte de l’Alsace et d’une partie de la Lorraine.
Au 19e siècle débute une phase de colonisation en Afrique et en Asie. Connue sous le nom de « Second empire colonial », elle atteint son apogée pendant la Troisième République (1870-1940).
Le gouvernement français instaure différents régimes administratifs au sein de ces territoires : mandat (Liban), protectorat (Maroc, Tunisie, Annam, Tonkin, Cambodge, Laos), annexion (Algérie).
Dans ce contexte, la douane doit assurer le contrôle des échanges commerciaux en Outre-Mer. Les services douaniers locaux ne dépendent pas administrativement de la douane française, mais leur organisation et leurs méthodes sont calquées sur elle. Aux missions habituelles s’ajoutent de nouvelles liées aux particularités locales, comme la gestion de la Régie de l’opium en Indochine ou la Régie des Kifs au Maroc.
Au cours du 19e siècle, les politiques douanières ont oscillé entre la volonté de protéger les productions nationales et un élan libéral au sein des échanges commerciaux.
À ses débuts, la IIIe République poursuit la politique de libre-échange mise en place par Napoléon III en 1860, mais à partir de1892, le protectionnisme triomphe à nouveau, pour plus d’un demi-siècle.
La Première Guerre mondiale bouleverse définitivement les relations internationales. Le retour en force du protectionnisme, accentué par la crise de 1929, rend à la douane l’importance qu’elle avait en partie perdue. Et c’est avec des effectifs à peu près constants, qu’elle doit appliquer des tarifs complexes, développer ses contrôles, s’adapter aux progrès technologiques, faire face à de nouvelles formes de fraude.
À partir des années 1950, les échanges commerciaux se libèrent progressivement. Membre fondateur du Conseil de Coopération douanière, la France s’engage dans une politique volontariste de coopération internationale. Ainsi, l’effacement progressif des frontières douanières se réalise. L’application des accords du GATT, la création des unions douanières, notamment de la Communauté européenne, mènent à une réduction des droits et taxes à percevoir lors du franchissement des frontières. La disparition des frontières fiscales au sein de l’Union européenne, en 1993, est l’aboutissement de cette évolution.
La douane continue à assurer ses missions dans ce nouvel environnement avec des méthodes d’intervention et un dispositif adaptés.
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